Trois jours après l’attaque qui a ciblé deux camions algériens dans les territoires libérés du Sahara Occidental, aucune information officielle n’a été donnée quant aux détails entourant cet “incident”. Deux informations ont néanmoins été confirmées dans le communiqué de la Présidence de la République Algérienne, le fait que l’attaque ait réellement lieu et la nature de cette dernière qui a été faite avec des moyens technologiques avancés.
Nous avons réussi à récolter quelques informations utiles, d’experts, des familles, de la société d’import-export qui a affrété les camions ainsi que de témoins présents lors du bombardement.
Qui sont les victimes?
Trois chauffeurs algériens, Hmida Boumediène de Laghouat, Ahmed Belkhir Chtam de Ouargla, Brahim Larbaoui de Ouargla, à bord de deux camions MAN immatriculés à Ouargla et affrétés pour une opération d’exportation de ciment blanc vers la Mauritanie.
Les deux camions revenaient à vide, leurs remorques n’étaient pas recouvertes de bâches. Les tracteurs étaient blancs et leurs remorques jaunes, sans aucun signe distinctif indiquant une quelconque menace ou le transport de quelconque marchandise prohibée. L’opération d’exportation légale est passée par les douanes algériennes et mauritaniennes. La société de transport assurait fréquemment des livraisons en Mauritanie et au Niger en plus de desservir le grand Sud algérien. Ce ne fut donc pas, de l’aveu du propriétaire de la société et des familles des victimes d’une opération de contrebande ou d’une aventure.
Quand a eu lieu l’attaque?
Le lundi 1er novembre 2021 entre 13h et 13h30.
Où a eu lieu l’attaque?
Il faut comprendre d’abord que les camions sont entrés par le poste frontalier algéro-mauritanien puis se sont engagés dans le coin Sud Est des territoires libérés sahraouis. La raison de la prise de ce raccourcis est, selon le propriétaire de la société de transport: d’éviter l’Erg et les risques d’ensablement et un gain de temps. Le fait que cette route soit aussi très fréquentée par les transporteurs, algériens, mauritaniens et sahraouis en fait un passage naturel dans la région. Route, comprendre, piste dans la H’mada (désert de rocaille dans la région), tracée par le passage fréquent de véhicules de gros tonnage.
Le bombardement a eu lieu à environs 7 km à l’Ouest de la ville de Bir Lahlou qui se situe dans les territoires libérés contrôlés, faisant partie de la cinquième région militaire de l’Armée de libération du peuple sahraoui (ALPS). Les coordonnées exactes du lieu de l’incident sont 26.328777,-9.692441. Une image satellite datant du 2 novembre montre l’endroit et les traces de brulures au sol (Crédits image Satellite IlKanguru avec son aimable autorisation).
Selon les vidéos et les témoins sur place, les deux camions étaient à l’arrêt lors du bombardement et stationnés côte à côte à quelques dizaines de mètres au Nord de la piste principale. Selon le témoignage d’une habitante de passage, un des deux camions avait une roue crevée, le second lui portait assistance.
L’endroit où se trouvait les deux camions se situe à plus de 35 kilomètres au Sud-Est du “mur de défense” marocain et des premières installations militaires des FAR. Les camions ne se sont à aucun moment dirigé vers les installations marocaines et ont longé, en maintenant une distance d’au moins 30 km le mur marocain.
D’où est venu l’attaque?
Dans un premier temps nous avions, sur la base de témoignages de routiers algériens fréquentant l’endroit, évoqué la possibilité d’une frappe d’artillerie marocaine. H’mida journaliste Sahraoui et ancien militaire, présent dans la zone a exclu cette possibilité à cause de l’éloignement des nids d’artillerie marocains d’une cinquantaine de Km de l’endroit. De l’absence de cratère et de la haute précision de la frappe. Lui, ainsi que de nombreux témoins ont vu au moins un drone provenant d’une direction Ouest faisant une ronde. Un témoignage vidéo confirme la présence de drone et le tir de deux missiles.
Selon plusieurs experts en armement, il s’agirait probablement d’une attaque de drone turcs Bayraktar TB-2 et de munition MAM-L ou de drones israéliens Hermes 450 équipés de deux missiles Hellfire. La vidéo montrant les deux véhicules calcinés confirme la haute précision de la munition et sa capacité explosive modérée.
Le drone aurait décollé de la base aérienne de Smara dans les territoires sahraouis occupés par le Maroc et qui se trouve à 230 Km du lieu de la frappe.
Quelles conclusions faut-il tirer de l’attaque?
Si le drone a pu cibler de manière aussi précise les deux véhicules c’est qu’il a très clairement identifié ses cibles qui étaient visiblement civiles (deux camions blancs vides à l’arrêt)
Le tir n’a pas pu avoir lieu sans confirmation d’une autorisation de tir et donc sans prise de conscience à un niveau hiérarchique élevé, les pilotes de drones étant des officiers et leur hiérarchie directe étant composée d’officiers supérieurs.
Il est donc probable que l’attaque ait été faite de manière délibérée en connaissance ou non de la nationalité des victimes.
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