L’annonce de l’élimination d’Aymen al Zawahiri, n’est pas une première, il a été donné pour mort plusieurs fois ces dernières années par des médias. Un coup, tué par un bombardement, un coup par l’âge et la maladie. La dernière fois qu’il a fait parler de lui c’était en 2021 où l’on annonçait sa mort du Covid.
Cette fois ci il semblerait que l’information soit vraie, Aymen al Zawahiri aurait été tué lors d’une frappe d’un drone Predator contre une maison où il logeait, dans un quartier cossu de Wazir Akbar à Kabul en Afghanistan.
Le retour du chef d’al Qaida en Afghanistan, après une longue installation dans les zones tribales au Pakistan, est un bon indicateur de l’emprise des Talibans, aujourd’hui au pouvoir à Kabul, sur l’organisation terroriste. Pour rappel, ils avaient joué un rôle essentiel dans le choix d’al Zawahiri pour la succession d’Oussama Ben Laden en juin 2011.
Les Talibans pourraient, une fois encore, influencer le choix du chef d’al Qaida en imposant la continuité du travail d’al Zawahiri en choisissant son gendre, Abderrahman al Maghribi pour successeur.
Ce dernier prendrait la place de Saif al Adl, qui fut déjà intérim à la tête de l’organisation après la mort de ben Laden en 2011 et qui a la légitimité historique et pratique (il était colonel de l’armée égyptienne) pour revendiquer la direction d’al Qaida selon de nombreux observateurs.
D’autres noms peuvent prétendre à la chefferie de l’organisation terroriste comme par exemple : Ahmed Ibrahim Fuad Rasul connu sous le nom de guerre de Abdallah al Kurdi, un irakien originaire de Kirkouk. Sultan yusuf Hassan al Arif, connu sous la « Konya » d’al Abdali. Fuad Ahmad al Shakhan, alias al Kirkuki.
Abderrahman al Maghribi, de son vrai nom Abbatay Mohamed, né à Marrakech en 1970, il occupait le poste d’Emir d’Alqaida en Afghanistan et au Pakistan mais opérerait depuis l’Iran. Il gère le bras médiatique d’al Qaida, la société al Sahab Media.
Saif al Adl, de son vrai nom Muhammad Ibrahim Makkawi, est un ancien colonel de l’armée égyptienne, âgé de 62 ans, il a rejoint al Qaida à ses débuts il y a trente ans en participant à l’élaboration et l’exécution des attentats de Dar Essalam et Nairobi en 1998. Il faisait partie du premier cercle d’Oussama Ben Laden et jouit de beaucoup de respect dans la communauté « djihadiste »
Quel impact aura la mort d’al Zawahiri sur l’Afrique du Nord et le Sahel ?
Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI), est la branche officielle d’al-Qaida en Afrique du Nord et dans le Sahel. Ses membres ont plaidé allégeance à l’organisation mère qui a adoubé le récent changement à sa tête après l’élimination d’Abdelmalek Droukdel en 2020. Néanmoins, AQMI a toujours travaillée en franchise autonome dans ses décisions par rapport à al-Qaida. Mieux, dans le Sahel elle fait partie d’une coalition (Front du soutien à l’Islam et aux Musulmans) JNIM en tant que membre non dirigeant et en n’étant pas majoritaire. Néanmoins, après la chute de l’Afghanistan, le Sahel et en particulier le Mali, cette zone es celle qui a le plus de chance de basculer dans le Djihadisme total et de concrétiser l’établissement d’un sanctuaire ou d’un Etat Islamique. Il faudra s’attendre donc à un regain d’intérêt d’al Qaida, qui pourrait vouloir prendre en main les choses et injecter plus d’hommes et de moyens pour concrétiser ses objectifs.
Néanmoins, ce postulat pourrait s’inverser, si l’on considère le rôle marginal joué par AQMI au sein de JNIM et les ambitions de son chef, Iyad Agh Ghaly, il est possible d’imaginer que la branche maghrébine de l’organisation pourrait devenir une carte à sacrifier pour un Agh Ghaly conquérant, voulant discuter d’une autonomie du Nord Mali ou même d’intégrer le processus politique de résolution de la guerre civile au mali, ou carrément sacrifier la participation d’AQMI dans sa coalition dans le cadre d’un accord de la communauté internationale quant à l’établissement d’une gouvernance totale de JNIM au Nord Mali.
Plus au Nord, en Algérie, Tunisie et Libye, AQMI est sur le déclin. En Algérie et depuis fin 2011, la plupart des terroristes s’appuient sur la fatwa d’Aymen al Zawahiri de septembre 2011 et qui limite le combat à l’autodéfense pour laisser place au « Printemps Arabe » dans une tentative de récupération de ce dernier. Une pratique répétée en 2019 et 2020 pendant le « Hirak » avec de multiples tentatives de récupération par l’organisation terroriste de ce mouvement populaire (par les discours d’al Annabi avant et après son intronisation à la tête d’AQMI).
Une réorganisation d’al Qaida et la survenue d’un radical à sa tête pourrait remettre en cause cette nouvelle doctrine et pousser à des actions désespérées mais spectaculaires des groupuscules subsistant dans les trois pays du Maghreb. Elle pourrait aussi accélérer la mort d’AQMI, totalement étranglée en Algérie et en Tunisie et une concentration de ses activités dans le Sahel.
Il est donc difficile d’imaginer l’impact de la disparition d’al Zawahiri sur l’Afrique du Nord, mais il est certain qu’on entendra encore parler d’AQMI et d’al Qaida et de leurs méfaits dans la région, surtout que la tendance est au désengagement des occidentaux.
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