Présentée à la hâte par le président tunisien Bèji Kaid Sebssi comme étant une “victoire de l’armée tunisienne sur Daesh qui comptait installer à BenGuardane un Emirat et faire “tache d’huile” dans l’ensemble du Sud tunisien, voir de l’Est Algérien, l'”Affaire” BenGuardane n’est peut-être pas ce que la propagande officielle et le déni provoqué par l’hystérie collective essayent d’imposer.
L’objectif a-t-il été de créer un émirat à BenGuardane?
BenGuardane, bien qu’importante en termes de positionnement ou de nombre d’habitants, il est difficile de voir en elle un point critique ou stratégique pour la Tunisie. pas de port, ni de base aérienne justifiant d’en faire une tête de pont pour une invasion. Elle n’est pas non plus défendable tactiquement, trop proche de la mer, elle n’est pas encaissée dans un quelconque relief empêchant une attaque de l’extérieur. La région connait même une météo clémente et une visibilité parfaite.
Pis encore, rien n’indique que la soixantaine de terroristes qui ont mené l’attaque aient voulu y rester, ils n’ont pris aucune mesure défensives. Pas de minage de rues, pas de baricades installées ou de voies coupées. Les djihadistes qui semblaient disposer de listes de personnalités sécuritaires et politiques de la ville, se sont contenté d’exécuter le chef du renseignement pour la région et n’ont pas pris d’otages, de façon à faire trainer leur présence.
Pour quelle raison auraient-ils agi de la sorte?
Seuls deux hypothèses nous viennent en tête. La première étant une action suicide du groupe qui avait été envoyé afin de tester les défenses et la réaction tunisienne. La seconde, plus plausible, est que le groupe avait été manipulés ou lâchés par leurs commanditaires en Libye, qui n’ont pas fait parvenir de renforts pour sécuriser la tête de pont ainsi créé dans le Sud Tunisien. L’autre possibilité est que les commanditaires ont réussi à atteindre leurs objectifs stratégiques.
Quels auraient pu êtres les objectifs stratégiques?
D’abord réussir l’attaque, assiéger et prendre une ville, tuer des membres des forces de l’ordre et des militaires tunisiens. Evaluer le temps de réponse et les moyens déployés par les autorités tunisiennes pour faire face à un assaut. Démontrer les capacités à opérer et à manœuvrer d’une organisation paramilitaire. Occuper les devants de la scène médiatique et démontrer un certain degré de supériorité militaire.
Quels enseignements les commanditaires ont-ils pu recueillir?
Le premier est qu’il est possible de traverser la frontière avec des véhicules et des équipements malgré le dispositif de douves installé par les autorités tunisiennes. Que les services de sécurité tunisiens sont quasiment aveugles la nuit. Que leurs plans de défense des bases et commissariats est plutôt faible, car de petits groupes ont pu neutraliser des casernes pendant un certain temps en profitant de l’obscurité puis d’une relative puissance de feu. Que l’armée tunisienne n’a pu faire intervenir son aviation ou ses hélicoptères ni pour traiter des cibles au sol ni pour la reconnaissance. Qu’en dehors des MRAPS des forces spéciales, l’armée tunisienne n’a pu manœuvrer des blindés et des chars ou mobiliser des moyens lourds autres que de l’infanterie pour intervenir. En gros il est possible sous ces conditions de déborder une armée tunisienne lente et peu équipée en utilisant de la vitesse et en fixant les troupes tunisiennes à certains endroits grâce à de la puissance de feu et donc progresser vers le Nord.
Conclusion
Les autorités tunisiennes doivent rapidement prendre en considération un véritable risque de blitzkrieg à l’image de l’attaque de N’Djamena conduite par une colonne de 4×4 de la rébellion à partir de la frontière avec le Soudan en 2008. Il aura fallu l’intervention de l’armée de l’air française pour stopper la colonne aux portes de la capitale tchadienne alors qu’ils avaient traversé plus de 800 kilomètres. Elles doivent aussi préparer et mobiliser l’opinion publique tunisienne pour faire face aux éventualités et surtout faire un travail sur la menace intérieur qui représente un danger permanent pour l’Etat tunisien.
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